Fin mai, j'ai eu le privilège d'être invité à la conférence Gordon Malaria Research Conference in Barcelonaoù j'ai animé une session sur le thème « Réutiliser les outils pour améliorer la lutte contre le paludisme» et présenté un exposé intitulé «La renaissance de la lutte génétique contre les vecteurs». Ce fut une occasion précieuse de présenter les travaux de l'ACEME et d'explorer les recherches en cours visant à développer des moustiques génétiquement modifiés comme outil de lutte contre le paludisme.

Réunion incontournable pour les experts de premier plan dans le domaine du développement de vaccins contre le paludisme, cet événement a donné lieu à des présentations stimulantes et encourageantes sur les vaccins de nouvelle génération contre le paludisme, dont certains ciblent simultanément plusieurs stades du parasite et promettent une efficacité améliorée contre la maladie.
La collaboration avec des chercheurs travaillant sur d'autres aspects de la lutte contre le paludisme est un aspect essentiel de notre travail. C'est grâce à ces discussions plus larges que l'on peut évaluer dans quelle mesure les autres connaissent les nouveaux outils tels que les technologies de forçage génétique, leur point de vue sur la manière dont ces interventions pourraient s'intégrer dans les programmes intégrés de lutte contre le paludisme, ainsi que leurs préoccupations ou leurs idées fausses. Cette collaboration est particulièrement précieuse car ces collègues sont bien conscients du fardeau que représente le paludisme, de la résistance croissante à certaines des interventions disponibles et du besoin urgent de solutions novatrices.
Ma présentation a porté sur le regain d'intérêt pour les approches génétiques de lutte contre les moustiques vecteurs, en soulignant les investissements substantiels réalisés dans ce domaine. J'ai retracé les origines de la lutte génétique contre les vecteurs jusqu'à la technique de l'insecte stérile (TIS), en soulignant ses premiers succès dans la lutte contre des ravageurs tels que la lucilie bouchère et les mouches des fruits, ainsi que ses résultats plus limités avec les moustiques Anopheles. J'ai également souligné que les programmes basés sur la SIT reprennent de l'ampleur, en particulier pour le contrôle des espèces de les moustiques Aedes qui transmettent la dengue.
J'ai ensuite présenté un aperçu des recherches en cours sur les approches génétiques ciblant les moustiques vecteurs du paludisme en Afrique, en comparant les différentes stratégies de forçage génétique en cours de développement, à savoir la suppression et la modification des populations.
J'ai conclu en soulignant que dans un contexte marqué par une résistance croissante aux insecticides et une importance accrue accordée à la durabilité, la lutte génétique contre les vecteurs offre une grande polyvalence et de nouvelles perspectives pour la lutte contre les moustiques et les maladies.
Les questions du public ont porté sur les implications écologiques des lâchers potentiels et les comparaisons avec d'autres stratégies, telles que celles qui exploitent la bactérie Wolbachia pour lutter contre les moustiques vecteurs de la dengue.
Il convient de noter qu'un autre discours liminaire de Jeremy Herren (ICIPE, Kenya) a abordé la lutte antivectorielle via des moustiques infectés par des microsporidies entomopathogènes, tandis que Zachary Stavrou-Dowd (LSTM) a présenté des recherches sur les gènes cibles du métabolisme du repas sanguin pour les approches génétiques de lutte contre les moustiques. Le fait que trois des rares exposés sur la lutte antivectorielle qui ont eu lieu pendant la conférence aient porté sur les stratégies de libération de moustiques suggère que ce domaine est dynamique et gagne en visibilité.
Il est intéressant de noter que les moustiques génétiquement modifiés apparaissaient fréquemment sur les diapositives de fond des parasitologues et des malariologues tout au long de la réunion, ce qui est un signe encourageant que les progrès dans ce domaine sont reconnus au sein de la communauté plus large des chercheurs sur le paludisme.
Dans l'ensemble, cette réunion s'est avérée très enrichissante dans un cadre magnifique et ensoleillé. Les organisateurs, Faith Osier (Imperial College, Royaume-Uni), Prasanna Jagannathan (Université de Stanford, États-Unis) et Marta Maia (KEMRI, Kenya), ont fait un travail remarquable en réunissant des experts à différents stades de leur carrière et issus de divers horizons. Je recommande vivement cette réunion et j'attends avec impatience la prochaine édition.